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E-mobilité : sur la route de la dette pour passer à l’échelle
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Secteur Privé & Développement - Business & Climat : de l'ambition à l'action
Proparco publie une édition hors-série de sa revue Secteur Privé & Développement, consacrée au rôle stratégique du secteur privé et des institutions financières face à l’urgence climatique.
Faire passer le secteur de la mobilité électrique à l’échelle exige de mobiliser la dette. C’est le message véhiculé par trois représentants d’investisseurs majeurs dans la décarbonation de véhicules en Afrique, en Inde et en Amérique latine.
La grande bascule vers la mobilité électrique et la décarbonation massive qui en résultera ne pourra pas se financer avec le seul concours des capitaux propres. Ce constat est partagé par de nombreux acteurs du secteur à travers le monde, à commencer par Nijhad Jamal, Managing Partner chez Equator VC. Cette société de capital-risque investit dans des start-up technologiques en Afrique. « Nous avons besoin de financements spécifiques pour le fonds de roulement et le financement des stocks », explique celui dont la société a été parmi les premiers investisseurs dans Roam Electric, une entreprise africaine pionnière de motos électriques au Kenya. « Nous avons besoin que les banques et les institutions financières non bancaires débloquent de la dette en monnaie locale pour permettre le financement des consommateurs [prêts, LOA, abonnements, pay-as-you-go, etc.]. » Pour faire passer le secteur de l’e-mobilité à l’échelle, la dette doit aussi servir à financer le coût de production des batteries, les infrastructures de recharge, proposer des subventions et de l’assistance technique pour aider à l’innovation et au développement de nouveaux marchés.
Pour ceux qui investissent dans le secteur de l’e-mobilité, les défis sont nombreux. Felipe Pinto est Managing Partner de Patria ; le principal gestionnaire d’actifs autonome en Amérique latine a décidé d’investir dans le business « aux fondamentaux très solides » de l’e-mobilité, en particulier sur le marché des camions et camionnettes destinés aux livraisons urbaines dans plusieurs pays d’Amérique latine. Après un démarrage prometteur de l’activité se pose la question du passage à l’échelle : il faut œuvrer pour « la création d’un nouveau secteur, donc le développement de l’écosystème, de la chaîne de valeur, de la chaîne d’approvisionnement. Mais si vous voulez faire cela entièrement en fonds propres, c’est impossible. »
L’exemple de Battery Smart en Inde
Cependant, les bénéfices potentiels sont considérables: Souleymane Ba, Partner chez Leapfrog investments, témoigne l’importance stratégique du secteur. En Inde, Leapfrog a investi dans Battery Smart, le plus grand fournisseur indien de batteries en libre-service pour les véhicules électriques à deux et trois roues, offrant aux conducteurs une mobilité pratique, bon marché et à faible émission de carbone. Un enjeu essentiel dans un pays où les émissions carbone de ces véhicules représentent jusqu’à 30 % des émissions totales dues aux transports.
« Pourquoi avons-nous investi dans le secteur de l’e-mobilité ? interroge Souleymane Ba. Tout ce que nous faisons doit d’abord avoir un impact climatique positif. Mais aussi: est-ce que le produit permet au client final d’économiser de l’argent? En tant qu’actionnaire, allez-vous gagner de l’argent? Et enfin, le dernier critère est la structuration de l’opération : pourrons-nous sortir de l’investissement et obtenir un bon rendement ? » Depuis son lancement en 2020, Battery Smart a atteint environ 45000 utilisateurs via un réseau de 1000 stations d’échange de batteries dans 30 villes en Inde, avec 120 000 batteries en circulation.
Une success story rendue possible grâce à l’appui de Leapfrog. Mais dans d’autres contextes où l’equity ne suffit pas, la mobilisation de dette auprès d’acteurs privés peut être un parcours du combattant. Notamment « dans de nombreux marchés africains où les banques font des marges bien plus élevées en prêtant au gouvernement plutôt qu’au secteur privé », alerte Nijhad Jamal. Et le Managing Partner d’Equator de résumer : « La demande est là. La technologie est là. Les marges deviennent respectables. Les différents acteurs de la chaîne de valeur se rassemblent et collaborent. Il manque juste le capital non-equity pour aider à soutenir les différentes parties du modèle. » La dette est bien le moteur nécessaire pour faire passer l’e-mobilité à l’échelle.
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