La finance climat en Afrique : rentable et profondément transformatrice

Quels sont les principaux défis du financement des projets climatiques en Afrique ?

Le plus grand défi demeure l’accès à des capitaux abordables, sur le long terme et à grande échelle. L’Afrique représente moins de 4 % des émissions mondiales mais subit les coûts du changement climatique les plus élevés. Pourtant, les flux financiers dédiés au climat et consacrés au continent restent inférieurs à 5% des volumes globaux. La perception du risque constitue un obstacle en soi : les projets africains sont souvent jugés trop petits, trop risqués ou trop fragmentés pour attirer les investisseurs internationaux. Par ailleurs, le manque de données harmonisées, de « pipelines de projets » solides et de mécanismes de financement hybrides complique la mobilisation des capitaux privés. La solution réside dans la création de véhicules d’investissement dé-risqués, capables d’aligner capitaux publics, privés et philanthropiques – tout en renforçant les institutions financières locales qui sont capables de structurer et de déployer les fonds à grande échelle. Chez Equity Group, nous combinons prêts verts, renforcement des capacités et partenariats mobilisant des capitaux concessionnels. Pour libérer au maximum le potentiel de transition et de résilience de l’Afrique.

Comment la finance climatique est-elle intégrée dans votre stratégie ?

La finance climatique est désormais au cœur du Plan de relance et de résilience pour l’Afrique d’Equity Group, qui vise à financer l’industrialisation verte et la croissance inclusive du continent. Nous ne considérons pas la durabilité comme un simple ajout, mais comme une priorité stratégique intégrée à toutes les facettes de notre activité. Notre stratégie climatique s’articule autour de trois axes: verdir en profondeur nos opérations internes, verdir également notre portefeuille de prêts, et accompagner nos clients dans leur transition vers des pratiques durables. Par l’intermédiaire de notre filiale, la Fondation Equity Group, nous renforçons également les communautés à travers l’agriculture intelligente face au climat, l’accès aux énergies renouvelables et la restauration des écosystèmes. Notre objectif est de consacrer plus de 30% de notre portefeuille de prêts aux secteurs alignés sur le climat d’ici 2030, en soutenant les petits exploitants agricoles, les micro, petites et moyennes entreprises ainsi que les industries dans l’adoption de technologies et pratiques plus propres. Cette approche globale lie croissance économique, protection de l’environnement et inclusion sociale.

Comment intégrez-vous les risques climatiques dans votre portefeuille et dans vos opérations ?

Equity Bank intègre la gestion des risques environnementaux et sociaux dans ses processus de crédit en s’appuyant sur des standards internationaux, comme les normes de performance de la SFI et les Principes de l’Équateur . Chaque demande de prêt fait l’objet d’un filtrage systématique qui permet d’identifier les risques climatiques et environnementaux potentiels.

Ces risques sont ensuite classés selon leur niveau d’exposition ; ils sont atténués par la mise en place de clauses contractuelles spécifiques et par un accompagnement personnalisé des clients. Nous développons également un Cadre de gestion des risques climatiques conforme aux recommandations de la Task Force on Climaterelated Financial Disclosures (TCFD), qui nous permet à la fois d’évaluer les risques physiques et les risques de transition. 

Notre équipe interne dédiée à la durabilité collabore avec les différentes unités opérationnelles pour travailler sur la résilience des secteurs clés, notamment l’agriculture, l’énergie et les infrastructures. Parallèlement, nous avons lancé des programmes de renforcement des capacités destinés à former nos collaborateurs et nos clients à la gestion des risques et des opportunités liés au climat. En intégrant ces mécanismes dans notre gouvernance, nous construisons un bilan financier résilient, capable de résister aux chocs climatiques tout en identifiant des opportunités de croissance verte.

En quoi votre gestion des risques climatiques relève-t-elle d’une approche intégrée ?

La gestion des risques climatiques est intégrée à chaque étape de notre processus de crédit, de la due diligence au suivi. Les secteurs à risque élevé font l’objet d’évaluations techniques approfondies, et des mesures d’atténuation sont intégrées dans les clauses de prêt. Nous expérimentons également des tests de résistance climatique pour notre portefeuille afin de détecter les secteurs les plus vulnérables aux sécheresses, inondations ou changements réglementaires. Ces analyses alimentent nos politiques de crédit et la conception de nos produits, garantissant la résilience à long terme de notre portefeuille. Par ailleurs, nous accompagnons nos clients dans le renforcement de leur propre gestion des risques climatiques. Cette approche intégrée fait de la durabilité un levier stratégique, source d’avantages concurrentiels et de stabilité financière.

Comment accompagnez-vous les PME dans leur transition environnementale et climatique ?

Les PME sont le pilier de l’économie africaine et un levier essentiel d’une transition juste. Equity Bank les soutient via une approche écosystémique intégrée, qui allie financement, renforcement des capacités et accès aux marchés. Nous proposons des lignes de crédit vertes sur mesure pour l’énergie renouvelable, la gestion de l’eau et l’agriculture durable, complétées par une assistance technique visant à aider les PME à respecter les normes environnementales et à conquérir de nouveaux marchés. Grâce à la Fondation Equity Group, nous formons les entrepreneurs à des modèles économiques climato-intelligents et à l’efficacité dans l’utilisation des ressources. Nos partenariats avec des institutions telles que Proparco et le Fonds africain de garantie permettent aussi de dé-risquer le financement des PME. Nous développons par ailleurs des outils digitaux et des tableaux de bord climatiques pour aider les PME à évaluer et améliorer leur performance en matière de durabilité. Cette combinaison de financement et d’expertise est la clé pour que les millions de petites entreprises africaines ne soient pas laissées pour compte, et qu’elles deviennent actrices de la transition verte.

Quel rôle les institutions de financement du développement (IFD) peuvent-elles jouer dans votre approche ?

Les partenariats avec les IFD sont essentiels pour combler le déficit de financement climatique en Afrique. Des institutions comme Proparco apportent non seulement des capitaux, mais aussi de la crédibilité, de l’expertise et des mécanismes de partage des risques qui nous permettent d’amplifier notre impact. Notre collaboration avec Proparco, qui repose sur la mise à disposition de lignes de crédit et une coopération technique, a renforcé notre capacité à financer des secteurs verts et inclusifs, de l’énergie renouvelable aux entreprises dirigées par des femmes. 

Les IFD jouent un rôle clé dans la réduction des risques des investissements initiaux, la mobilisation de capitaux privés et l’alignement des flux financiers sur les Objectifs de développement durable. En combinant leur soutien avec notre présence locale – plus de 18 millions de clients en Afrique de l’Est et centrale – nous créons un effet de levier puissant. Ensemble, nous démontrons que la finance climatique en Afrique peut être rentable et profondément transformatrice.

Quels progrès significatifs avez-vous observés grâce à vos initiatives ?

Nos progrès se mesurent tant en chiffres qu’en impacts concrets – autant quantitativement que qualitativement. Ces trois dernières années, nous avons apporté plus de 500 millions de dollars à des projets d’énergie renouvelable, d’agriculture « intelligente face au climat » et de PME vertes. Nous avons aidé plus de 1,4million d’agriculteurs et d’agricultrices à adopter des pratiques agricoles régénératrices et favorisé l’accès à l’énergie propre grâce à des solutions solaires et au biogaz. 

Nos agences fonctionnent désormais majoritairement à l’énergie renouvelable, et nous visons la neutralité carbone de nos opérations d’ici 2030. Au niveau communautaire, le programme de reforestation de la Fondation Equity Group a déjà permis la plantation de plus de 26 millions d’arbres au Kenya, en RDC et au Rwanda. Ces actions concrètes traduisent notre ambition climatique en résultats tangibles.

Comment mesurez-vous l’impact social et environnemental de vos actions ?

Nous mesurons notre impact en adoptant une approche « triple résultat », qui prend en compte à la fois les personnes, la planète et la prospérité. Notre système interne de gestion des risques environnementaux et sociaux suit la performance durable du portefeuille, tandis que des évaluations indépendantes sont menées sur nos programmes communautaires via la Fondation Equity Group. 

Parmi les indicateurs clés figurent la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le nombre d’emplois verts créés, la capacité soutenue en énergies renouvelables, ainsi que l’amélioration des conditions de vie grâce à l’accès à l’eau potable, à l’éducation et à la santé. Nos rapports sont alignés sur des référentiels internationaux tels que les Objectifs de développement durable (ODD), le GRI et la TCFD. Au-delà des chiffres, nous sommes convaincus que l’impact se mesure concrètement dans des vies améliorées, des écosystèmes restaurés et des entreprises locales florissantes. Notre vision est que chaque dollar investi génère une valeur partagée à la fois pour les populations et la planète.